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Interview | Gilbert martiniquaisà  Séoul

Retrouvez les interviews de membres Caribexpats tous les joursà  12h30 en partenariat avec la radio RCI dans l'émission "Les Antillais dans le Monde".Aujourd'hui Gilbert, martiniquaisà  Séoul (Corée du Sud) nous fait découvrir son parcours.Pour passerà  l'émission contactez-nous : team caribexpat.com (remplacer par @)


Partie 1 - Interview de Gilbert martiniquaisà  Séoul (Corée du Sud)

Je suis d€™abord allé en Guadeloupe puisà  Montréal oùje suis en train de passer un doctorat €œétude et pratique des arts€ avec comme €œmajeure€ comme ils disent  "thétre". Parallà¨lement j€™ai eu une proposition, parce qu€™un des professeurs de l€™université du Corée du Sud oùj€™enseigne en ce moment avait vu mon travail dans un spectacle et m€™avait dit queàça serait trà¨s intéressant que je travaille avec leurs étudiants. Entre temps, deux ans ce sont passés et je me suis retrouvéà  Montréal au sein de mon université. J€™ai commencé mes études doctorales et puis j€™ai encore été sollicité en Corée. Je me suis arrangé avec mes Directeurs de thà¨se pour que cela fasse partie de mon doctorat. J€™ai été détaché dans une forme d€™exploration de ma recherche et je me suis retrouvé en Corée du Sud. Je travaille avec mes étudiants sur un sujet qui me passionne, c€™est-à -dire, la tradition orale, notamment en Guadeloupe: le Lewoz, car je suis un homme de thétre et je m€™en inspire profondément.

En Corée du Sud il y a cette tradition de l€™oralité qui permet de faire une jonction ?

Il y a une tradition millénaire en Corée comme dans beaucoup de pays asiatiques. Il y a un thétre trà¨s fort, des contes, des légendes, l€™équivalent de tout le magico- religieux qu€™on trouve dans la tradition animiste en Afrique et dans la Caraà¯be. Dans les pays asiatiques comme en Corée, il y a cette tradition millénaire donc j€™ai trouvé beaucoup de points communs avec la passion qui me fait m'intéresserà  ma propre tradition orale. J€™ai parlé avec une guadeloupéenne qui est venue voir le spectacle que j€™ai mis en scà¨ne récemment  dans l€™université de Corée. Elle me disait que la musique coréenne traditionnelle lui faisait penserà  certains moments musicaux de chez nous, de nos traditions orales basées sur le tambour. Ils ont aussi des musiques traditionnelles avec beaucoup de présence de tambours. Récemment j€™ai travaillé avec un groupe d€™étudiants sur une pià¨ce que j€™ai écrite, un spectacle que j€™ai créé oùil y a la présence du créole, la musique, les chants de la Guadeloupe. C€™était assez intéressant de voir comment des personnes d€™une culture si lointaine géographiquement de nous, entraient dans l€™univers que je leur proposais et qu€™est-ce qu€™elles amenaient aussi. C€™est une expérience originale.

Comment est-ce que vous appréhendez ce déplacement en Corée du Sud ?

Je n€™avais jamais mis les pieds en Asie. Je rêvais d€™aller au Japon et quand on m€™a fait cette proposition j€™étais un peu inquiet. J€™ai déjà  enseigné dans des universités comme intervenant extérieur mais je me disais que cette fois c€™est différent, parce que je vaisêtre dans un pays oùje ne parle pas la langue. J€™avais un peu le trac et finalement j€™ai parlé avec un collà¨gue metteur en scà¨ne et directeurs de thétre que je connais depuis longtemps qui était invité lui aussi en Corée, justement dans l€™établissement oùje suis. Il m€™a dit « tu sais, il vaut mieux établir un dialogue avec les gens, les écouter, au lieu de venir et dire que c€™est commeàçà  qu€™on fait€¦€. Quand je suis arrivé je me suis présenté. J€™ai deux interprà¨tes qui se relaient pour travailler avec moi mais je parle parfois directement en anglais ou franàçais avec certains étudiants.

Partie 2 - Interview de Gilbert martiniquaisà  Séoul (Corée du Sud)

Cela a été un dialogue. Je me suis dit que je viens de la Caraà¯be, j€™ai parlé de mon expérience en Martinique et en Guadeloupe. Cela les intéressait beaucoup et puis on est rentré dans leurs inspirations, dans les choses que je connaissais qui sont liées au Lewoz,à  la tradition de danse. Ils me montraient aussi comment ils fonctionnaient puisque c€™est leur culture. Quel que soit ce qu€™ils font, ils ont des cours qui leurs apprennent aussi ce côté qui fait partie de leurs traditions. Les gens sont voués corps etmeà  leurs études et ils sont vraiment sollicités. Parfois, ils arrivent au cours fatigués parce que les élà¨ves dans cette université qui est une école de formation au thétre et au cinéma sont engagés dans plusieurs spectacles. Ils ne sont pas dans un seul projet car ce sont des études extrêmement exigeantes. Mais il y a vraiment eut un dialogue avec eux et je me suis senti content de représenter une culture dominée. J€™ai parlé de l€™esclavage et la colonisation aussi et du dénigrement de cette culture, et voir que je peux parler fià¨rement et que les gens sont intéressés par la beauté et l€™importance que cette culture a pour moi...c€™était des moments trà¨s gratifiants.

Parlons de la vie sur place, parce que qu€™il n€™y avait pas forcément d€™interprà¨te tout le temps. Finalement tu as appris le Coréen ?

Bien sà»r. Je suis arrivé en Corée en mars 2017. Déjà  en avril j€™ai voyagé pour honorer des contrats. Ensuite il y a eut les vacances oùje suis retourné en Guadeloupe donc en tout et pour tout je suis resté en Corée disons cinq mois. Un de mes grands centres d€™intérêts quand je suis dans un pays, c€™est d€™aller au marché. Je connais les mots de base comme : "combienàça coà»te ? "C€™est quoi ?". Je commenceà  savoir compter, les salutations les plus basiques etc. J€™ai pris des cours de coréen et je continue car j€™espà¨re que j€™aurai l€™occasion de revenir pour continuer cette expérience que je trouve vraiment stimulante. Peut-être pas dans les mêmes conditions et pas obligatoirement dans la même université maisàçà  me motive. C€™est d€™ailleurs une condition sinéquanone pour avoir un contact avec les gens car peu de gens parlent l€™anglais ou le franàçais.

Comment décrire la vie sur place, les bonnes choses  ou moins bonnes ?

J€™ai eu trà¨s peu de temps de faire du tourisme car j€™ai vraiment un travail trà¨s absorbant. Mais j€™aime bien me promener dans les ruesà  Séoul car je ne sens pas de tensions. Beaucoup de gens s€™inquià¨tent par rapportà  la situation mondiale, aux différents conflits. Un ami Coréen me disait que la vie est sà»rement plus dangereuseà  Paris qu€™en Corée du Sud. Je ne sens pas de regards sur moi parce que je suis un étranger et évidemment les gens ne s€™attendent pasà  ce que je parle Coréen. Les gens sont ouverts et prêtsà  communiquer malgré la difficulté et la langue.

Partie 3 - Interview de Gilbert martiniquaisà  Séoul (Corée du Sud)

Les tensions entre les deux pays, Corée du Sud et Corée du Nord durent depuis 74 ans. S€™il arrive un conflit, cela ne sera pas nécessairement parce que les deux pays veulent se lancer dedans etàça n€™a aucun intérêt pour eux. Les puissances extérieures seraient capables d€™attiser les choses sinon les gens font ce qu€™ils ontà  faire : ils vivent, mangent, ils communiquent. Je suis content d€™être ici, je n€™ai pas souvent rencontré de Coréens mais j€™ai rencontré quelques guadeloupéens et martiniquaisà  Séoul. Il n€™y en a pas beaucoup mais on est en contact et ils sont venus  me rendre visiteà  l€™université. J€™ai une amie guadeloupéenne en Corée du Sud depuis sept ans et elle a appris le Coréen. Les gens sont extrêmement contents de voir qu€™elle le parle bien etàça lui donne la possibilité d€™être encore plus proche d€™eux.

Parlons de nourriture locale, commentàça se passe ?

J€™étais extrêmement surpris de voir les points communs entre la cuisine coréenne et antillaise. La cuisine coréenne est extrêmement épicée, elle ne ressembleà  aucun autre pays asiatiques dans la texture et la manià¨re de cuisinier. Un Guadeloupéen dont la femme est coréenne disait qu€™elle retrouvait aussi des choses communes dans la cuisine antillaise. Il y a du piment, des patates douces, je crois qu€™il y a des ignames et du manioc aussi. Récemment je recevais des amis et je voulais leur faire un plat de la Guadeloupe que j€™aime beaucoup : la chiquetaille de morue. Je n€™ai eu aucun malà  trouver de la morue et des patates douce, aussi des bananes jaunes. Je cuisine beaucoup le poulpe, le chatrou. Il y a beaucoup de légumes dans la cuisine coréenne : tubercules, légumes verts, céréales, bien sà»r le riz est la céréale de base. Je ne me sens pas du tout inconfortable par rapportà  la nourriture, je mange bien malgré le fait que je ne mange pas de viande. Je mange trà¨s bien et je trouve trà¨s bien la manià¨re dont les épices sont utilisées.

Finalement, un retour possible aux Antilles ouà  Montréal ?

Je retourneà  Montréal le 20 décembre 2017 dateà  laquelle mon contrat en Corée s€™achà¨ve. Je dois continuer ma recherche doctoraleà  l€™UQUAM, c€™est l€™université de Québecà  Montréal. J€™ai deux cours obligatoires jusqu€™à  mai ou juillet 2018 puis aprà¨s je serai dans une phase d€™écriture.

Du point de vue professionnel, quelle est la suite de tes projets ?

En avril 2017, j€™ai écrit une pià¨ce. Je ne m€™attendais pasà  ce qu€™elle soit demandée ici en Corée. Le directeur du département thétre de l€™université m€™a dit : "puisque tu as écrit une pià¨ce inspirée par la tradition orale, travaille là  avec des étudiants comme une partie de ton travail ici". J€™ai donc réuni plusieurs étudiants et on a monté cette pià¨ce  qui se passe dans la Caraà¯be et donc qui est interprétée par des Coréens. L€™idée était de faire venir aussi des artistes de la Guadeloupe pour intégrer l€™équipe existante et en faire un objet thétral qui puisseêtre montré en Martinique, en Guadeloupe, dans la Caraà¯be et ailleurs mais le projet est en cours.

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