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Interview | Isabelle antillaiseà  Milan

Retrouvez les interviews de Caribexpats tous les joursà  12h30 dans "Les Antillais dans le Monde" en partenariat avec la radio RCI. Aujourd'hui nous partonsà  la rencontre d'Isabelle, antillaiseà  Milan, originaire de Guadeloupe. Cette architecte d'intérieur s'est installée en Italie en 1998 oùl'une de ses difficultés c'est d'ailleurs de ne pas avoir rencontré la communauté antillaiseà  Milan. Elle vous encourageà  tenter l'Italie !Pour passerà  l'émission, contactez-nousà  team caribexpat.com (remplacer par @) !

Réécouter l' interview d' Isabelle antillaiseà  Milan

Partie 1 €“ Interview d€™ Isabelle antillaiseà  Milan

Vousêtes architecte d€™intérieur. Ca fait 20 ans que vousêtes en Italie. Comment a commencé l€™aventure pour vous ?

J€™étais dans une école d€™Art Visuelà  Orléans et quand j€™ai passé ma thà¨se, le Président du Jury a choisi les deux premiers qui ont réussi. J€™étais la deuxià¨me de la promotion donc il m€™a invitéeà  venir faire un stageà  Milan et l€™aventure a commencé.

Ensuite vous avez commencé  à  travailler là -bas. Comment l€™intégration s€™est passée l€™intégration professionnelle ?

Tout a été relativement simple parce que je pense que je suis arrivée au bon moment et j€™ai rencontré tout de suite des gens qui m€™ont ouvert la porte pour débuter dans la vie professionnelleà  Milan. J€™ai commencé dans un studio d'architectes. Je suis devenue un peu la fille de mon patron, parce qu€™il n€™avait que des fils. Il m€™a pris sous son aile. Je ne parlais pas un mot d€™Italien. Pendant 3 mois, lui et sa femme m€™ont donné des cours. Aprà¨s trois mois j€™ai commencéà  parler parfaitement l€™Italien, et j€™ai travaillé pour lui pendant quasiment 2 ans.

Comment apprendre la langue sur le tas ? C€™était beaucoup de cours intensifs ?

Oui, je ne suis pas alléeà  l€™école en fait. J€™arrivais au bureau, il m€™avait préparée les journaux sur mon bureau. Il parlait plusieurs langues et il me parlait en Franàçais et traduisait. Sur tout un mur du bureau, j€™avais des posts it avec les mots écrits en Franàçais et en Italien. J€™avais aussi de la chance parce que j€™avais étudié l€™Anglais et l€™Espagnol au lycée. Ca n€™a pas été trà¨s difficile parce que l€™Italien ressemble un peuà  l€™Espagnol et au Franàçais. J€™ai eu peur au début naturellement parce que quand tu ne connais pas  la langue, c€™est assez difficile. Mais en Italie tout le monde le sait, on parle avec les gestes. Je me suis dit €œde toute faàçon, tu as 3 mois pour apprendre la langue autrement tu rentres en France, puis en Guadeloupe et tu recommences€. Au bout de trois mois, j€™ai réussi, donc je n€™avais aucun problà¨me pour travailler en Italie et y vivre.

Qu€™est-ce que vous avez dà» faire pour vous familiariser avec le pays ?

Je dois dire la vérité j€™ai eu de la chance. A travers mes collà¨gues, mes patrons j€™ai réussià  connaître plusieurs personnes. Je me suis fait pas mal d€™amis trà¨s vite puisque naturellement étant femme, étant exotique,àça a été assez simple. On avait un groupe de travail magnifique, donc je n€™ai pas eu forcément de problà¨mes. C€™est si simple quand tu es ce que tu es et que tu n€™essaies pas d€™être autre chose ou une autre personne. Ca passe trà¨s vite et j€™étais un peu le clown du groupe donc j€™ai réussià  me faire pas mal d€™amis trà¨s vite et rentrer petità  petit dans la vie Italienne.

Est-ce qu€™il ya eu des démarches particulià¨resà  effectuer pour votre installation en tant que travailleur ?

Quand j€™ai passé ma thà¨se en architecture d€™intérieur, j€™ai eu la Bourse Leonardo qui m€™a  permis, quand je suis arrivée, d€™avoir une certaine indépendance financià¨reà  part le salaireà  la fin du mois. On rentrait aussi dans le monde de l€™Europe, donc pendant deux ou trois ans, j€™ai dà» m€™inscrire pour avoir un certificat disant que je travaillais en Italie. Aprà¨s s on en avait plus besoin puisqu€™on faisait partie de l€™Europe. Les Franàçais n€™avaient aucun besoin d€™avoir de documents particuliers. Tu arrives, tu veux travailler, tu te trouves un travail tout de suite aprà¨s.  Du moment que tu fais partie de l€™Europe tu n€™as aucun problà¨me d€™intégration. Maintenant, on fait beaucoup de sélection mais quand tu arrives et que tu es Franàçaise, il n€™existe aucun problà¨me particulier.

Partie 2 €“ Interview d€™ Isabelle antillaiseà  Milan

Comment vous avez pu vous intégrer en tant que femme Antillaise en Italie. Il n€™y a pas eu de soucis là -dedans ?

Aucun souci, aucun sexisme même si l€™Italie est basée sur les hommes. Les hommes travaillent, les femmes restentà  la maison en majorité. Les femmes antillaises ont un caractà¨re relativement fort et quand je suis arrivée je me suis beaucoup imposée. Je n€™ai travaillé quasiment qu€™avec les hommes parce que sur les chantiers on ne travaille qu€™avec les hommes, la femme est vue de manià¨re particulià¨re. Et au début naturellement il y a eu une forme de barrià¨re, ils ont toujours l€™habitude de travailler avec un architecte homme et pas un architecte femme. Naturellement avec le caractà¨re entre guillemets de €œvieille chabine€ j€™ai réussià  m€™imposer età  démontrer que je savais ce que je voulais et ce que je faisais. Et maintenantàça fait 20 ans que je travaillais avec les mêmes groupes de poseurs, d€™ouvriers etàça marche trà¨s trà¨s bien.

Y-a-t-il un avantage d€™être en Italie par rapportà  votre secteur d€™activité l€™architecture d€™intérieur ?

Oui, au départ  j€™ai choisi de faire un stage et de connaître le monde Italien, ou plutôt milanais. A Milan tout est focalisé sur le design, l€™architecture d€™intérieur, l€™architecture en générale et la mode. J€™ai toujours été une grande fan de l€™art et l€™Italie, c€™est le berceau de l€™art, donc il n€™y avait aucun problà¨meà  ce que je puisse y vivre et y rester. En Italie il n€™y a pas  une ville qui n€™a pas un monument particulier, un artiste particulier. Je suis vraiment tombée amoureuse de ce pays. C€™est pouràça queàça fait 20 ans que j€™y suis et je pense y rester encore quelques années.

Le choix était vraiment mà»ri pour rester ?

Le choix était mà»ri depuis toute petite, j€™étais trà¨s attirée par ce pays. J€™avais l€™impression d€™yêtre attachée. C€™est étrange, je me suis toujours dit €œun jour je partirai en Italie€, sans même le vouloir. Quand j€™ai passé ma thà¨se, je ne savais pas que j€™allais avoir un Président du jury qui était un architecte Italien. Quand je suis arrivée juste avant de commencer les examens, ils se sont présentés. Ils ont dit €œla premià¨re ou la deuxià¨me de la promotion vient travailler avec moi€. Je me suis dite je me battrai pourêtre dans les deux premiers. J€™ai réussi et j€™étais ravie de pouvoir partir. C€™était une opportunité que je ne pouvais pas laisser passer.

Comment est la vie italienne qui est complà¨tement différente sans doute de la vie aux Antilles ?

La vie est complà¨tement différente. Elle est frénétique. En fait en Italie on travaille énormément, on bouge beaucoup, on vit beaucoup dehors. Je suis tombée amoureuse aussi des plats Italiens donc tu n€™as pas le temps de rentrer chez toi et faire un dîner, tu sors. La vie italienne c€™est rencontrer beaucoup de monde, c€™est de sortir, même si aprà¨s 20 ans on se calme un petit peu, mais c€™est des apéritifs dehors toujours avec des collà¨gues ou des amis.  C€™est partir le Dimanche dans les environs au Lac de Côme ou au Lac de Garde. Les gens ne restent jamais chez eux. Il y a toujours une exposition, un nouvel artiste, un concert, une pià¨ce de thétre. C€™est assez, pour ceux qui y vivent et qui aiment beaucoup l€™art. On est accepté d€™une manià¨re. C€™est un peu comme dans une grande famille, c€™est assez compliqué. On rencontre une personne, qui vous apprécie beaucoup et vous fait rentrer dans un groupe de personnes qu€™elle connaît etàçà  devient quasiment une famille. On forme des espà¨ces de familles oùon s€™entraide, c€™est une belle faàçon de penser.

Partie 3 €“ Interview d€™ Isabelle antillaiseà  Amsterdam La mentalité, quand je suis arrivée il y a 20 ans, c€™était léger. J€™ai appelé mes parents pour leur dire €œje reprends l€™avion parce qu€™il n€™y a aucune personne de couleur. Ils sont tous Italiens€. Je venais de la France, de Paris oùtout est un melting pot, et j€™arrive, et il n€™y avait aucune immigration. C€™était seulement les Italiens du Sud qui immigraient au nord, mais il n€™y avait que des Italiens. Je suis arrivée en 1998 il n€™y avait personne. En l€™espace de deux ans, il y a eu une forte immigration, qu€™à  la différence de la France, l€™Italie n€™a pas connu. En tout cas pas l€™Italie du Nord. L€™impact a été violent pour eux et ils se sont un peu renfermés sur eux. Ils se sont habitués maintenant,àça fait 20 ans qu€™ils sont colonisés, ils apprennent ce qu€™est la colonisation. Tout le monde vit un peu en harmonie.

Et qu€™en est-il de la communauté antillaiseà  Milan ? Voilà  mon gros problà¨me. Je ne connais aucune communauté antillaiseà  Milan. Je n€™ai jamais connu ni un Martiniquais, ni un Guadeloupéen. J€™ai connu beaucoup de Cubains, mais d€™Antillais de Martinique ou Guadeloupe non. Ils ne viennent pas en Italie et se serait bien. J€™en discutais un jour avec une personne et je disais €œce serait bien d€™ouvrir un magasin oùl€™on vend des produits antillaisà  Milan, on vend du rhum, etc€. Je ne sais pas siàça aurait du succà¨s, mais ils sont curieux et veulent bien connaître la Guadeloupe, la Martinique, et comment on y vit. Je cuisine pour les amis et j€™apporte du rhum quand je vais aux Antilles. C€™est peut-être une porte ouverte aux Antillais qui veulent venirà  Milan. Ouvrons une quelque chose qui puisse faire connaître un peu le pays !

Est-ce qu€™on peut un peu s€™attarder sur l€™éducationà  l€™italienne qui est différente de l€™éducation antillaise ? Quelle est la différence entre les deux ? Les femmes italiennes sortent relativement tôt du cocon familial. Ce sont plus les hommes qui restent dans la famille plus un peu attachés de leurs mà¨res. On les appelle €˜El Mamone€™,àça veut dire, les €œpetits enfants de maman€. Cet attachement de l€™homme vers sa mà¨re est viscéral. Quand on vient de l€™extérieur c€™est assez choquant. En Guadeloupe, on est attachéà  nos parents mais pas de faàçon aussi intense. Les femmes deviennent quasiment plus libres plus tôt. C€™est quelque chose d€™assez particulier. Le rapport entre les enfants et les parents est assez profond. On a ce côté un peu Latin, même si on est Antillais et qu€™on aime beaucoup la famille. Mais on a plus de respect envers les parents.

C€™est ce qu€™on ne trouve pas forcément en Italie ? Ce qu€™on ne retrouve pas forcément en Italie. En plus l€™éducation, ces dernià¨res années, est un peu plus laxiste. Les parents vivent pour eux et peu pour leurs enfants. C€™est quelque chose qui me gêne pas mal, parce qu€™on est habituéà  vivre avec les grands-mà¨res, les grand-pà¨res, la maman et le pà¨re. Cela me marque pas mal. Mais on a forcément comme base, que ce soit l€™Italie ou les Antilles, la famille. Ici, on se moque deàça. Aux Antilles, le dimanche, si on peut, on va manger avec les parents, on amà¨ne les petits enfants, on laisse les petits enfants aux grands-parents. Ici, il n€™y a pas ce rapport de petits-enfants qui restent le week-end chez mamie.

Partie 4 €“ Interview d€™Isabelle antillaiseà  Milan

Aprà¨s  20 ansà  Milan, est-ce que vous  avez penséà  un retour au pays ?

 Je savais que vous alliez me poser cette question et je me la suis posée aussi d€™ailleurs.  Aprà¨s 20 ans c€™est difficile, aprà¨s 10 ans je dirais peut-être oui. J€™ai créé ma vie ici. La dernià¨re fois j€™y ai pensé, j€™en parlais avec une amie et peut-être que je viendrai pour les derniers jours de ma vie en Guadeloupe. Mais je ne pense pas rentrer non. A un certainge non, je  ne pense pas que je réussiraià  reconstruire et encore faire tout ce que j€™ai fait avant. En fait j€™ai été adoptée. Je suis comme mes amis antillais m€™appellent, la Milanaise. Je ne renie pas du tout mon côté Antillais, d€™ailleurs je l€™ai fait noter pas mal en Italie. Mais j€™aime trop voyager, j€™aime trop ma vie italienne fondamentalement. On est proche de la Grà¨ce, l€™Espagne, la France. Je voyage beaucoup donc cette liberté je ne sais pas si je réussiraià  la reconstruire sur uneîle. J€™adore rentrer au Guadeloupe, rester aux Antilles mais je ne sais pas si je réussiraià  me réhabituerà  la vie là -bas. Je dois dire la vérité tout me manque de là -bas, mes amis, la famille, la nourriture. J€™en rêve et parfois j€™en reparle quand je suis avec mon pà¨re au téléphone, avec les copines et qu€™on est proche de Noà«l. J€™ai envie de rentrer manger un jambon de Noà«l. Cela me manque énormément. Y vivre j€™aurai peut-être un peu de difficultés mais parce que c€™est déjà  difficile de partir de sonîle. Quand on s€™habitueà  un autre pays qui est 20 fois 30 fois plus grand c€™est difficile de se retrouver sur uneîle et de réussirà  faire exactement ce qu€™on fait ou ce qu€™on réalise dans un autre pays.

Qu€™est-ce qu€™on peut vous souhaiter de bons pour les annéesà  venir ?

Peut-être de rentrer plus souvent aux Antilles. C€™est une gros manque, le manque de rentrer souvent aux Antilles, d€™être contente, d€™être simple, de vivre comme on vit. La seule chose que je demande aussi c€™est que j€™aimerais bien que les jeunes antillais voyagent plus. Cela rapporte beaucoup,àça ouvre beaucoup l€™esprit. Etàça vous permet de vous connaître vous aussi.  Pas seulement en France, pas seulement dans les Caraà¯bes mais de voyager ailleurs, de connaître les choses. Peut-être que les jeunes rentreront aux Antilles, ils apporteront leurs connaissances, chose que je n€™ai pas faite. Je vous embrasse tous. Je salue mon pays, monîle.

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