Le retour au pays en Martinique... Si le rêve se concrétise pour certains, il est finalement de courte durée pour d'autres comme l'explique Esther. Néeà Sainte-Lucie, ayant grandi en Martinique, son parcours scolaire et professionnel l'emmà¨ne de la Guadeloupeà Los Angeles, en passant par Toulouse et Paris. Aprà¨s sa décision de retour au pays en Martinique en 2009, Esther a dà» repartir malgré elle. Elle vit aujourd'hui en Guyane. Dans notre Caribexpat Live spécial "Retour aux Antilles : quels défis quels enseignements ?", elle nous fait part de son expérience.
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Parle-nous de ton parcours !
Je suis néeà Sainte-Lucie. Trà¨s tôt je suis arrivée en Martinique. Déjà , au collà¨ge, les professeurs et les camarades me disaient que je pourraisêtre professeure d€™anglais. Je me suis dit que ce n€™est pas parce que j€™ai un atout que je vais en faire une profession. Lors d€™une séance d€™orientation, j€™ai découvert que j€™étais intéressée par les métiers de la logistique. J'ai voulu m'orienter versàça mais j'ai fait un petit détour par les études scientifiques. Lors de ma premià¨re expatriation en Guadeloupe, j'ai décidé de retournerà la logistique. Je suis partieà Toulouse pour les études et j'ai obtenu un bac + 4 en logistique. Je suis arrivéeà Paris et j'ai été recrutée chez Renault pour mon premier poste grceà ma maîtrise de la langue anglaise. J'assurais la distribution des manuels du conducteur pour les pays européens et la Caraà¯be. J'ai passé de belles années. J'avais toujours ce rêve de vivre dans un pays anglophone. Je suis partieà Los Angeles en passant par une agence de placement. J'ai trouvé un poste en logistique. Ensuite, j'ai continué dans d'autres entreprises. J'y suis restée 4 ans. C'était vraiment des paysages magnifiques. Chaque fois, je me disais "tu n'es pas en vacances, tu y vis !". C'était l'occasion de rencontrer des nouveaux amis mais j'avais aussi mon réseau antillais. Je suis retournée en Martinique en 2009. J'ai passé un concours et j'ai été mutée en Guyane oùje suis aujourd'hui professeure d'anglais.
Quel a été l'élément déclencheur pour ton retour au pays en Martinique ?
En 2009, au moment de la crise aux Antilles, c'était assez difficile. Ma grand-mà¨re me disait €œou pa ka viré ?". Quand je suis partie auxà‰tats-Unis, je voulais y rester entre 3 et 5 ans. Je me suis dit que je rentre au pays en Martinique.Çà a faisait déjà 17 ans que j'étais hors de la Martinique. Quand j'ai décidé de rentrer, je me suis rendue compte que j'avais vécu autant de tempsà l'extérieur de la Martinique qu€™en Martinique. Donc c'était le moment pour moi de revenir au pays. 17 ans c'est pas mal d'années d'absence !
Comment t'es-tu préparée pour ton retour au pays en Martinique ?
Çà a coà¯ncidait avec un moment de ma vie oùje prenais du recul. Je sentais que je n'avais plus envie d'être dans la rat race, les réunions, les rapports... J'ai pris ce moment-là pour pouvoir me poser,être au calme et réfléchirà ce que je voulais. Je savais que je voulais plus d'autonomie. J'ai commencéà me demander ce que je pouvais vendre comme compétence. C'est là que mon atout, l'anglais, est revenu. J'ai commencé, en tant qu'auto-entrepreneuse,à proposer des coursà des clients.
Même s'il n'y avait pas une préparation intense, j'ai toujours gardé le lien avec la Martinique. Je revenaisà peu prà¨s tous les deux ans. Pour mon retour, j'avais juste ma motoà vendre.
Comment se sont passés tes premiers mois de retour au pays en Martinique ?
On sait qu'on rentre et qu'on a pas de date de retour sur le billet :àça fait toute la différence ! Dans un premier temps,àça fait plaisir. Pour moi, c'était l'occasion de retrouver ma grand-mà¨re et les autres membres de la famille, de pouvoir vivre ensemble tous les événements (Noà«l, Pques€¦) et retrouver le lieu de mon enfance. J'ai apprécié tout cet environnement. J'ai retrouvé la Martinique que j'avais laissée. Je sais qu'à Los Angeles, j'étais encore plus émerveillée parce que c'était un endroit que je ne connaissais pas du tout. Je découvrais des choses différentes par rapportà la Martinique. Aprà¨s, je me suis demandée comment j'allais faire pour retrouver cet émerveillement. C'est vrai qu'il y a une autre faàçon de voir les choses : j'ai découvert de nouvelles choses en Martinique. Vous savez, parfois, on passe au même endroit mais en regardant différemment. Donc j'avais aussi cet émerveillement de la Martinique.
Qu€™est-ce-qui t€™a motivéeà repartir de Martinique pour la Guyane ?
Je suis repartie malgré moi. Le temps d'être en Martinique m€™a permis de découvrir la mer qui est aussi mon autre passion. J'ai passé les diplômesà l'école, je commenàçais trà¨s bien dans le domaine. En même temps, je poursuivais mon métier de formatrice en anglais. J'ai eu l'opportunité d'être dans l'à‰ducation nationale. Mon projet, c'était de pouvoir allier la mer et l'anglais. Je voulais avoir différents publics pouràça : dans le privé avec des personnes qui passeraient une journée en immersion dans la langue anglaise ou pour les groupes scolaires, avec des sorties pédagogiques en anglais.Çà a se déroulait bien mais j'ai voulu plus de stabilité donc j'ai passé le concours national, le CAPES, pourêtre professeure pour le secondaire (collà¨ge et lycée). J'ai réussi le concours. C'est mon troisià¨me vÅ“u, la Guyane, qui a été retenu, bien que mon premier voeu était de rester en Martinique. Je suis arrivée en Guyane en septembre 2019. Je m'adapte parce que la Guyane, c'est le pays adoptif de mon aà¯eul. C'est donc une faàçon de renouer avec la famille qui est sur place, de découvrir de nouveaux paysages et de continuer aussi dans la voile.
Comment s'est passée ton adaptation en Guyane ?
Çà a s'est bien passé. Il est important d'avoir un point de chute. Je cherchais déjà depuis la Martinique. J'ai notamment utilisé le site blada.com. On peut y trouver des propositions de logement. Ensuite, c'était ma 4e expatriation donc j'étais déjà rodée sur la faàçon de procéder pour la recherche de logement. C'était assez facile. La premià¨re semaine, j'étais chez une cousine. J'habite maintenantà Saint-Laurent-du-Maroni en pleine nature. C'est un endroit trà¨s calme. Quel que soit le lieu d'expatriation, il est important d'y remettre les ingrédients qui nous tiennentà coeur. Je continue donc la voile.
Tu es rentrée en Martinique puis repartie. Quels enseignements en tires-tu ? Si c€™étaità refaire, aurais-tu fait exactement pareil ?
J'aurais pu ne pas travaillerà l'à‰ducation nationale. Mais je me rends compte qu'il ne s'agit plus de partir ou de rester mais de changer sa base. Ensuite, on a tout le loisir de partir. Désormais, ma base est aux Antilles, en Martinique. De ma base, je vais oùje veux même si dans ce cas-là , c'était contraint. Je continueà voyager. Bien sà»r, l'idée c'est de rester le plus possible dans ma base. Cependant, dans le secteur de l'à‰ducation nationale, il faudrait que d'autres personnes puissent Å“uvrer dans ce sens. Malheureusement, quand je suis arrivée, les syndicats ne montaient plus au créneau pour faire en sorte que les Martiniquais ayant réussi le concours restent en Martinique, alors qu'il y a des postes et qu'il est possible de rester. Par exemple, une année la Guyane a organisé un concours local et les personnes qui réussissaient étaient sà»re de pouvoir rester en Guyane. J'aurais peut-être la possibilité de rentrer dans 5 ans. Ensuite, lorsque il manque quelque choseàça ouvre la voixà la création. Donc j'aimerais lier la pédagogie de l'anglaisà la voile. L€™enseignement, pour moi c€™est que nous devonsêtre acteurs. Lors d€™un retour au pays, ce qu€™il n€™y a pas sur place, tchons de le faire.
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Le contexte actuel (grà¨ves, coà»t de la vie, chlordécone€¦) ne te donne-t-il pas envie de partir ?
Ce contexte m€™incite plutôtà rester etêtreà bras le corps dans la lutte pour avoir quelque chose de mieux. Comme le disait Cédric, les problà¨mes, il y en a aussi ailleurs. L'idée, c'est de choisir sa base et de faire en sorte de participerà la construction du paysà son niveau. Il faut régler les problà¨mes dans son paysà son échelle et non pas les fuir. Quand on est plus jeune, c'est plus facile. On peut partir ailleurs et ensuite rapporter des choses au pays afin de voir dans quelles mesures on peut améliorer les choses sur place. Par exemple, il y a cette association Toastmaster International qui est une association pour s€™améliorerà la prise de parole. J'étais trà¨s contente de voir qu'il y avait déjà un club qui existait en Martinique. Pour moi, c'est un outil essentiel car savoir bien communiquer c'est la clé du pouvoir. Avoir cet outil en Martinique ou en Guadeloupe c'est trà¨s bien. D'ailleursàça n'existe pas encore en Guyane : c€™est là oùje peux contribuer.
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